Tranches de vie
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Episode 1
Deux semaines à Casablanca
20 juillet 2019

Casablanca de grand matin (9:00 !), deux semaines après notre arrivée. Nous allons très bien tous les quatre. Notre vie a totalement changé depuis le 6 juillet.
Bien sûr les activités quotidiennes restent les mêmes où que l’on soit, on range, on nettoie, on fait des lessives et on cuisine tous les jours. Pour le reste, nous sommes dans un autre monde : on discute avec les voisins et les gens dans la rue, on dit bonjour des dizaines de fois par jour à des inconnus. Nous sommes obligés de prendre le temps pour chaque petite chose à faire, du coup, on est moins stressés. C’est impossible ici de dire « je vais à la banque, au marché,… je reviens dans 10 minutes » car tu ne sais jamais combien de temps tu prendras, même si c’est en bas de chez toi.
Après avoir passé la semaine à courir les administrations pour officialiser notre présence sur le territoire (ce n’est pas gagné, mais ici on reste positif en toute circonstance, suite de nos aventures lundi 6:30 à la Sûreté Nationale), aujourd’hui nous passons la journée à la plage à faire les carpettes.
Ça aussi… ça nous change ! Quel luxe ! On en est bien conscients.
Vous allez me dire « Oui Virginie, c’est bien. Mais il faut aussi travailler ! » Ben oui, comme partout. Et nous avons un travail, une connexion internet (yeahhh !) et des contrats.
Voilà pour les petites nouvelles d’en bas !
Episode 2
Trois semaines à Casablanca
26 juillet 2019

Pour les garçons c’est moins facile que pour nous… car ce n’est pas leur choix. Mais ils commencent à apprivoiser leur environnement. L’appartement avec toutes leurs petites affaires et puis la ville.
Ils ont d’abord appris à traverser une rue – oui oui, ici cela s’apprend – et maintenant ils prennent le taxi à deux pour se rendre à gauche et à droite.
Ils ont aussi commencé les cours d’arabe avec un professeur haut en couleur ! Je ne dirais pas qu’ils sautent de joie mais ils comprennent que c’est essentiel pour leur cursus scolaire qui débute le 9 septembre.
La plage, l’océan, le surf le beau temps, la gentillesse des gens aident, bien sûr, mais la nostalgie de la Belgique est aussi parfois bien présente.
Nous sommes néanmoins persuadés que c’est une expérience extraordinaire pour eux… un bagage qu’ils pourront utiliser pour construire leurs propres vies.
Episode 3
Quatre semaines à Casablanca
3 août 2019

Petit déj et bilan.
Nous devons apprendre à désapprendre pour ensuite réapprendre.
Apprendre à prendre le temps, à ne pas vouloir tout tout de suite, à relativiser : tu passes des heures dans une administration pour au final te voir refuser le dossier car il n’est pas complet – ils ajoutent des petites finesses au fur et à mesure sans te prévenir. Finalement, après 5 passages à la préfecture de Police, nous avons pu remettre notre dossier.
Apprendre à être contents quand Mohamed nous place des demi-étagères dans le placard de la salle de bain – je me suis trompé dans les mesures Sidi – Oui Mohamed, de 30 cm quand même…
La vie ici est vraiment différente : tu vas chercher ta baguette en pyjama chaque matin, ton réfrigérateur n’est plus jamais plein (tes armoires non plus), car tu consommes différemment. Tu manges des aliments qui ont du goût. Tu prends beaucoup de temps pour les cuisiner puisque c’est du vrac et du coup tu manges à 22:00.
Tu ne sais plus ce qu’est une carte de banque car tu paies tout en espèces ou avec des chèques.
Après avoir travaillé ou avoir fait les tâches quotidiennes tu peux – si tu veux – faire une vraie pause à la plage.
Tu ne te préoccupes plus du temps qu’il fera demain, ici c’est toujours le même.
A 41 ans c’est plutôt bénéfique de bouleverser ses acquis. On est sorti de notre « zone de confort » et on réapprend à vivre… différemment.
Personnellement je me sens beaucoup plus sereine dans ce mode de vie. Je suis moins stressée et plus en accord avec moi-même.
Aucun point négatif au bilan donc. Sans doute que cela viendra avec le temps, car l’herbe n’est pas plus verte ailleurs.
Quoi que …
Episode 4
Cinq semaines à Casablanca
9 août 2019

Un pays d’espions ?
Lorsque nous avons commencé à prospecter au Maroc, les Casaouis nous ont expliqué qu’ici… tu n’as pas de vie privée.
Tout le monde sait tout de toi : le gardien de rue, le cireur de chaussures, l’épicier, le mokaddem (espion en titre) et bien sûr ton concierge, sans parler de tes voisins de l’immeuble (de celui d’en face – et des alentours également), de la caissière, du coiffeur, etc…C’est le KGB, la CIA, le MI6 à tous les coins de rue.
Nous voilà prévenus !
Aujourd’hui, je n’ai pas l’impression d’être observée quotidiennement… mais je sais que je le suis.
Mardi nous sortions de l’immeuble et nous croisons un voisin tout sourire « Ah ça fait un mois que vous êtes là maintenant !!! » Oups… « Euhhh oui… ça fait un mois jour pour jour… »
Je reçois la facture d’eau et d’électricité et je ne comprends pas le système pour la payer. Je demande à un voisin une explication. Il me dit qu’une personne paie pour lui et donc, il ne connaît pas la procédure. Du coup je lui dis « Ce n’est pas grave, je vais demander à Omar » (le mec du 10ème, le président du syndic et visiblement l’ancêtre des lieux) et il me répond en regardant sa montre « Ah et bien tu peux l’attendre, il va arriver d’une minute à l’autre, il rentre toujours à cette heure-ci !»… Moi…. ???!!!
J’en ai d’autres en stock. Mais je ne vais pas m’étaler, ça donne déjà un bon aperçu.
Sincèrement, c’est un peu surprenant au début car on n’a pas l’habitude, mais ça ne nous dérange pas. C’est convivial (pensée pour A.) et on se sent clairement en sécurité du coup. Puisque tout le monde te connaît, il ne peut rien t’arriver.
Ils connaissent tes intentions avant toi. Bientôt on va me dire « T’es pas allée chercher la baguette ce matin Birjini ? Tout va bien j’espère ?! »
Lundi, nous sommes invités dans une famille pour l’Aïd al-Adha – La fête du Sacrifice, plus communément appelée la fête du mouton (bien qu ce ne soit pas sa fête). Nous sommes très heureux d’y participer et honorés d’y être conviés. Je vous raconterai – ou pas – notre première fête Musulmane. J’avoue j’ai une petite crainte pour le sacrifice en question.
Update : en relisant mon texte J+1, je me rends compte que le commérage est aussi ma spécialité et que je suis faite pour vivre ici. Hier, j’ai croisé un voisin dans le hall et je lui ai dit « T’étais en vacances Abdellatif ? Ça fait une semaine qu’on ne t’a pas vu ! »
Episode 5
Six semaines à Casablanca
17 août 2019

Le train-train quotidien.
Au départ, je pensais faire une petite chronique chaque semaine pour vous narrer nos péripéties marocaines, mais la vie ayant repris sont cours « normal », je suis déjà à court d’idées.
Les activités que l’on fait ici et que l’on ne pouvait pas faire en Belgique : telles qu’aller à la plage, se balader sur la promenade avec vue sur l’océan, faire ses courses au marché entre les carcasses de bidoches et les poules qu’on égorgent… font partie de nos habitudes maintenant.
L’être humain s’extasie au début pour finalement s’adapter très rapidement. Ce qui était exceptionnel ne l’est plus, mais reste un réel plaisir.
Nous avons repris le travail depuis deux semaines. Les journées ont toujours le même rythme. Cela dit, c’est plus agréable de travailler ici avec vue sur les palmiers et les orangers. C’est notre opinion et uniquement la nôtre.
Sinon – comme je l’avais dit après la deuxième semaine – on fait des courses, on prépare les repas, on range, on nettoie, on fait des lessives, on pend le linge, on fait les comptes… bref, rien de neuf sous le soleil… enfin si, faire tout cela au soleil… ça change tout!
Episode 6
Huit semaines à Casablanca
31 août 2019

D’où nous est venue l’idée de partir… ?
Avant de parler du Maroc et des Marocains, où plutôt de Casablanca et des Casaouis, il faut tout de même que je vous éclaire sur la raison de notre immigration ici.
Je ne vais pas écrire: « d’aussi loin que je me souvienne… j’ai toujours voulu partir ! ». Car c’est faux. Mon enfance et mon adolescence en Belgique ont été très heureuses.
A 22 ans j’ai fait mon premier grand voyage. Je suis partie en Guadeloupe. J’ai ADORÉ cette île. Les couleurs vives, la population créole, les paysages, l’ambiance et le climat. BAM mon envie de partir en vadrouille venait d’éclore. Je ne voulais plus rentrer ! Ma fille était avec moi. J’avais tout !
Je suis rentrée.
A 23 ans j’ai eu la chance de voyager un mois en Tanzanie. Le type avec qui je suis partie était loin d’être un cadeau, mais il faut bien avouer que c’est précisément à ce moment là que j’ai su qu’il y avait un mode de vie qui me correspondait beaucoup mieux. Je voulais absolument rester là-bas et j’en avais réellement l’occasion, mais ma fille était en Belgique.
Je suis rentrée.
Et heureusement, car…
A 24 ans j’ai « rencontré » celui qui est aujourd’hui mon mari. Vous savez que ce n’est pas vraiment à 24 ans que je l’ai rencontré mais on s’en fout des détails, et l’histoire est bien trop longue.
On a joué à «Si on sort ensemble je veux que tu saches que…», il y a eu du bla-bla et moi j’ai dit – entre autres – «Je ne ferai pas ma vie en Belgique». Il était ok pour vivre de nouvelles expériences.
La vie en a décidé autrement…
Nous avions nos jobs, nos amis, notre routine.
Et les années passaient…
Nous avons eu les garçons, ma fille grandissait et nous avons monté le projet du café-concert.
Nous avions une vie bien remplie.
Plus de grands voyages non plus – pas le temps et pas l’argent – donc tout ça m’était un peu sorti de l’esprit.
Je vais essayer de condenser…
On s’est essoufflé dans notre quotidien. Il ne nous correspondait plus du tout.
On avait passé de belles années mais on en avait fait le tour.
Nous sommes partis en Inde. Une claque monumentale. LE VOYAGE !
En rentrant on a décidé de tout vendre et de changer de vie!
Évidement, tout ça n’a pas été linéaire, il y a eu des embûches.
On a d’abord pensé immigrer à la Guadeloupe mais finalement elle s’est avérée trop petite (vite fait le tour) et bien trop cher (même les fruits et légumes sont hors de prix).
On a pensé au Sénégal, mais pas longtemps. Mauvaise connexion internet, notre gagne pain.
On a + que pensé à l’Inde, mais les villes où l’on pouvait habiter (connexion internet toujours) sont vraiment très polluées.
Episode 7
Deux mois jour pour jour à Casablanca
6 septembre 2019

Il y a deux mois, le 6 juillet, nous allions arriver à l’aéroport Mohammed V de Casablanca.
J’ai mis un pied sur le sol Marocain et j’ai été malade comme un chien !
La pression du déménagement et des dernières semaines en Belgique redescendait.
Clôturer – car c’est vraiment le terme – 41 ans de vie ce n’est pas si simple…
Le lendemain de notre arrivée, à 10:02 exactement, nous avions une proposition de job.
La vie continuait… mais ailleurs.
Mais qu’est ce qui a réellement changé pour nous ?
Voici en vrac des bribes de vie:
- Croiser un type dans l’ascenseur de ton immeuble qui appuie sur le 6 à ta place (ton étage) alors que tu ne l’a jamais vu auparavant.
- Apprendre à vivre avec un max de bruit la journée (on adore) et un max de calme la nuit. C’est flippant, on dirait que tout le monde meurt vers 1:00 du mat… et ensuite se faire réveiller par le chant du coq le matin ! Je jure, c’est vrai ! Et nous sommes en pleine ville.
- Organiser son temps différemment. Nous avons beaucoup de travail, mais la pression n’est pas la même. J’ai l’impression que même nos clients belges sont devenus plus cool. Ce n’est qu’une impression… c’est surtout notre perception qui a changé. Ici on dit « mashi moshkil » tout le temps, ça veut dire « pas de problème ». On te lobotomise en fait ! Du coup tu te sens confiant et tranquille. Pas de problème ! C’est bon ! Autre expression favorite du Marocain: c’est bon… (safi…)
- S’habituer à ne plus avoir de boîte aux lettres. Moi qui avait le flippe de la boîte aux lettres, comme beaucoup d’entre vous j’imagine… et bien c’est fini. Nous avons deux factures par mois. L’eau et l’électricité (ensemble) et Maroc Telecom. Voilà. On peut passer à autre chose.
- Dire Bonjour. Je n’ai jamais autant dit bonjour ! «Salam Aleykoum, Labès ? Hamdoulah ça va !» J’adore.
- Parler à des inconnus. Ça t’arrive tout le temps. Dans le taxi, dans une salle d’attente, au marché: tu parles, tu parles et tu parles encore. J’adore aussi.
- Retrouver des fringues. Tu mets toutes tes fringues. Ben oui, il fait beau tout le temps. Et puis tu te changes beaucoup car tu ne traînes pas à la maison avec les mêmes vêtements que tu mets pour sortir (respect) donc tu retrouves des vieux trucs d’il y a 10 ans que tu ne savais même plus que tu avais ! Ça fait plaisir. Et vivre en tongs aussi… je n’ai plus mis de chaussures depuis 2 mois.
- Profiter : être dans un taxi, musique Arabe à fond, et regarder la vie qui défile. Les gens qui vaquent à leurs occupations, les palmiers, la chaleur, les odeurs. Même les embouteillages, tu les apprécies !
- Ne plus avoir de programme précis. A 19:00 tu te dis « je ferais bien un poulet ? » , tu vas au marché et tu fais ton poulet à l’aise. Ceux qui me connaissent bien, savent que chez moi à 18:30-19:00 max tout était plié ! Organisation – ça c’était avant.
- Prendre du temps. Je n’ai jamais passé autant de temps avec numéro 2 & numéro 3 ! J’aurais aimé que numéro 1 soit là aussi pour que tout soit parfait… mais on ne peut pas tout avoir.
Voilà, certains diront que c’est la nouveauté, la découverte,… et qu’un jour je ne ferai plus attention à tout cela.
Oui, sans doute… mais je vis l’instant présent, et pour le moment c’est comme ça.
Rien de super excitant donc, mais on réapprend à vivre… autrement. Et à profiter !
Episode 8
Douze semaines à Casablanca
28 septembre 2019

Pas une seule seconde nous avons regretté notre choix. Bien au contraire.
Pourtant, notre vie a radicalement changé.
Elle a longtemps été basée sur la fête et les amis. Nous n’avons pas cela ici et on s’en porte très bien. Les priorités ont changés.
Je ne m’ennuie plus jamais. Le samedi ne rime plus avec ivresse – qui comblait sans aucun doute le vide. Je ne sais même pas vous décrire ce que je fais le samedi… sans doute la même chose que les autres jours…
Nous sommes contents d’avoir migré à cet âge avancé et avec toute l’expérience acquise en Belgique. Car, croyez moi, elle est précieuse.
Nous avions l’impression d’être en permanence pressés comme des citrons au plat pays et c’était le cas. Mais aujourd’hui, on a conscience que c’était une bonne formation.
Nous n’avons pas de filet au Maroc. Aucune aide, pas de mutuelle, pas de chômage ni de retraite. Nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, sur notre travail, sur notre perception et notre capacité à réagir face aux différents événements.
Le fait de ne pas avoir été élevés «Peace and Love» nous aide à prendre les «bonnes» décisions, à avoir un regard «clair» sur certaines situations.
Pour résumer on se met la pression tout seuls.
Car oui, vivre dans un autre pays que celui où l’on a été éduqués, implique des changements… beaucoup de changements.
Dans le comportement (je suis sanguine et réactive – ici je dois souvent me taire !), dans la découverte des us et coutumes et l’adaptation à celles-ci, dans le mode de consommation,… un autre sujet à développer.
Pour exemple : nous avons acheté deux choses ici. Un ordinateur – que l’on attend depuis deux mois ! – et des lits, que l’on a déjà dû changer trois fois à cause de malfaçons.
Le calme et la patience sont des maîtres mots.
Mais tout cela est tellement enrichissant !
Apres bientôt 3 mois, nous avons de loin dépassé tout ce que l’on espérait en prenant cette décision.
Et cerise sur le gâteau: j’écris ce post sur la terrasse, au soleil, il fait 26 degrés et le ciel est d’un bleu magnifique (comme tous les jours).
J’ai eu mes parents hier au téléphone et je sais qu’il ne fait pas très beau chez vous, alors… courage (perso c’est vraiment une chose qui me plombait en Belgique. Autant dire que j’étais souvent plombée !).
PS: nous ne sommes toujours pas sortis de Casablanca. Les Marocains me disent que je vais adorer l’extérieur. Que le Maroc est un pays merveilleux. Je n’ai aucun doute là-dessus et j’espère que l’on pourra programmer ça bientôt. Programmer, programmer,… l’ européen programme ! En même temps, beaucoup de boulot et pas de filet donc, économies, prévisions,… ça limite le champ d’action…
PS2: SURPRISE !!! Notre ordinateur devait arriver samedi prochain – après avoir été retardé 10 fois et … Hamdoullilah, il arrive dans 4h00 ! Encore une preuve que le Maroc est surprenant !
Episode 9
Que mange-t-on à Casablanca ?
29 septembre 2019

Je ne peux parler que pour nous, petite famille Belge qui habite ici depuis peu de temps.
Je ne suis pas Marocaine, je ne passe pas un temps infini en cuisine à préparer des plats excellents – heureusement pour moi et malheureusement pour ma famille.
Mais nous mangeons tout de même très bien ! La balance nous le confirme – à tous les 4.
On nous avait dit que le Maroc était le pays où l’on mangeait le mieux au monde.
Au monde je ne sais pas, car je n’ai pas eu la chance d’en faire le tour, mais c’est DÉLICIEUX!
Tout à beaucoup de saveur et de goût. Les plats sont relevés sans trop l’être (comme en Inde). On prend vraiment plaisir à manger. Peut être parce qu’ on n’a pas l’habitude et que pour nous tout est nouveau. Je ne sais pas… on verra. En attendant, on profite.
Nous achetons nos aliments soit au marché permanent qui se trouve à côté de chez nous, soit chez l’épicier qui se trouve au rez-de-chaussée de notre immeuble, soit au Carrefour Market qui est à deux min à pied.
Vous voyez le côté pratique ?
Au Carrefour on trouve absolument tout, même du halouf (porc). J’en ai acheté une seule fois pour faire une quiche et j’étais morte de honte, pourtant la caissière s’en fichait, c’est vraiment moi qui ai flippé.
On essaie de manger un max local mais parfois, si on doit gagner des points avec les enfants par exemple, on peut leur ramener un Snickers ou du chocolat belge, ça fait toujours plaisir!
Chez les petits épiciers (hanout) il y a de tout. Ça me fait toujours penser à mon village autrefois… c’est génial ! On adore et j’aimerais dire qu’on les privilégie mais nous n’avons pas encore l’habitude. J’y vais de plus en plus souvent et les enfants aussi.
Par contre je suis pratiquement tous les jours au marché. Je connais déjà beaucoup de vendeurs, on rigole et on discute alors que je parle encore très mal le darija et qu’ils parlent peu le français. Mais c’est ça qui est cool !
Et donc, qu’est ce qu’on cuisine?
Des spaghet bolo, des poulets-frites (maison), des pilons-riz, des poulets-grenailles, des saucisses de poulet. Vous l’aurez compris, beaucoup de volaille, mais aussi beaucoup de légumes et de crudités.
Je n’ai pas vraiment modifié ma cuisine. J’ai juste appris à faire la harira, c’est une soupe Marocaine délicieuse et, paraît-il que je la maîtrise.
Le midi on mange de la baguette et on a remplacé le jambon par la dinde. On a toujours le Gouda de Hollande.
Et le matin, les garçons mangent des céréales avec du lait (ici c’est La Centrale – Danone) et nous baguette et confiture «Aïcha» – une institution apparement !
En Belgique je ne déjeunais plus depuis de nombreuses années… mais depuis que je suis au Maroc, je n’ai pas raté un seul petit déjeuné.
Sinon on va régulièrement manger dans les bouis-bouis du quartier, c’est moins cher que cuisiner à la maison (ou presque pareil) et c’est super bon!
Pour exemple, un tajine avec un pain et une assiette de lentilles c’est l’équivalent de 2,50€.
Episode 10
Les soins de santé au Maroc
3 décembre 2019

Remettre les pendules à l’heure…
« Nous ne serons jamais aussi bien soignés qu’en Belgique ».
Dixit maman, qui me l’a répété 1000 fois au bas mot et dixit beaucoup de monde en fait.
Alors je veux rétablir les choses en fonction de notre expérience.
Avant de partir, nous avons fait tous les examens et contrôles que l’on pouvait faire préventivement ou pour réparer des petits bobos.
Médecin généraliste bien sûr mais aussi ORL, gastro-entérologue, chirurgien, gynécologue, radiologues (plusieurs), dentiste, orthodontiste, dermatologue, ostéopathe, spécialiste des maladies tropicales, et j’en oublie sans doute.
Nous avons rencontré tout ce petit monde en l’espace de 2-3 mois avec un max de RDV dans les 2-3 semaines avant notre départ… il se trouve que l’un de nous avait un souci.
Je me permet d’en parler aujourd’hui car c’est derrière nous.
Dès que nous sommes arrivés ici nous avons dû composer avec le corps médical Marocain.
Pas possible de régler le problème en Belgique puisque nous partions.
Je n’étais pas confiante, j’avais toujours cette petite phrase de ma mère en tête.
Elle était tenace et bien ancrée.
Et en fin de compte, ils ont été d’une gentillesse, d’un professionnalisme et d’une disponibilité indescriptibles…
Une empathie que je n’ai JAMAIS (c’est uniquement notre expérience) rencontrée avant.
Sauf peut être avec le chirurgien de LLN qui avait été top.
Au pays, on nous a balancé des trucs sans explication et sans bienveillance, on te garde 10 min dans le cabinet montre en main, on te laisse avec des termes incompréhensibles dans les bras et… internet pour essayer de dépatouiller tout ça.
Tu veux prendre un RDV pour une écho, un scanner? La liste d’attente est de 2 mois Madame, fin août j’ai des disponibilités!… Fin août?
C’est une blague?
Tu veux prendre un RDV pour une écho, un scanner? La liste d’attente est de 2 mois Madame, fin août j’ai des disponibilités!… Fin août?
C’est une blague?
Ici tu téléphones et tu as ton RDV le lendemain voir le jour même et ce partout: généraliste, chirurgien, scanner, radio, orthodontiste, dentiste,…
Pour les prises de sang, on traverse la rue (labo en face), on se fait piqué et on a les résultats quelques heures après par e-mail.
J’imagine que les $$$ sont dans vos pensées…
Effectivement, il faut avancer l’argent.
Et c’est sans doute très difficile pour un Marocain qui gagne le smic. Mais je ne suis pas là pour parler de ça.
Nous avançons l’argent (300€ pour un scanner – je ne connais pas le prix plein en BEL) et ensuite nous sommes remboursés à 70%.
On a souscrit à une assurance santé – qui équivaut à la mutuelle en Belgique – et on paie le ticket modérateur.
Les médecins ici ont – pour la plupart – fait leurs études en France, mais ils gardent l’âme et l’esprit Marocain: ils prennent leur temps.
C’est la seconde fois que l’on nous sort un bouquin de médecine pour illustrer le sujet afin d’être sûr que l’on comprenne bien.
Ils expliquent la situation en jargon médical et ensuite ils te traduisent avec des mots simples, des explications claires comme de l’eau de roche.
Merci.
On n’avait jamais vécu ça auparavant…
Et je parle de tout le corps médical.
Alors oui, avec l’expérience que l’on a jusqu’à présent, si je devais accoucher demain, je n’hésiterais pas une seconde : je choisis le Maroc.
Désolée maman.
UPDATE : 3 septembre 2024, voici ce que j’écris aujourd’hui. Autre discours !
Episode 11
Le coût de la vie à Casablanca
1 novembre 2019

Il y a mille façons de penser et autant de manières de vivre au Maroc. Il y a de la place pour tout le monde.
Le loyer :
Dans les quartiers populaires, on a rencontré une personne qui payait 60€ de loyer par mois. Trois petites pièces, une petite cuisine et une mini SDB, le tout super bien décoré et agencé. Mais je pense que la plupart du temps ce type de logement coûte 100/200€.
Dans les quartiers comme le nôtre – entre les deux on va dire – le loyer est entre 400 et 900€. En fonction du nombre de chambres, de la surface à vivre, de la vétusté du bien, du fait qu’il soit meublé ou pas (souvent meublé ici) et de la situation : parfois d’une rue à l’autre il peut y avoir des différences importantes.
Et dans les beaux quartiers c’est au delà de 1000€ et ça peut aller jusqu’à 3000€ voir plus.
Bon, autant dire qu’à 3000€ ce sont de trèèèès beaux apparts.
Dans les quartiers avec les villas (600m2 quand même !) c’est aux alentours de 3000€ et plus.
L’école :
L’école du gouvernement est gratuite. Comme l’école communale en Belgique.
L’école Belge et la mission Française sont exagérément chers (et leur discours, ne nous a pas convaincu DU TOUT).
L’école Américaine et l’école Internationale n’en parlons même pas.
Nos enfants sont à l’école privée Marocaine. On est loin du budget scolaire Belge puisqu’il avoisinait les 0€.
C’est clairement un poste important à prendre en compte.
De plus, Jules et Gaspard suivent des cours particuliers d’Arabe tous les samedis.
Activités :
On n’a pas vraiment de budget activités.
On s’est inscrits à la salle de sport en arrivant: 125€ pour un an. Sinon tout ce qu’on fait est gratuit: Océan, balades, découverte des quartiers – à savoir que Casablanca est 40% plus grand que Bruxelles – on a le temps avant d’épuiser les visites.
Donc… dans ma petite application géniale – dont je vous ai déjà parlé (Budget Malin 2.0) – je n’ai pas de poste activité et quand j’en ai un, ce n’est pas un montant conséquent.
Mobilier et électroménagers :
Nous nous félicitons d’avoir emporté toutes nos affaires de Belgique. Le prix de l’électroménager est élevé, IKEA est environ 20% plus cher. Les autres meubles vendus ici ont… leur style on va dire. Nous avons tout apporté, donc nous n’avons rien dû acheter. Sauf des lits – même prix qu’en BEL.
Produits de soin :
Les produits de soin sont au même prix, voir moins chers pour certains. On trouve toutes les marques habituelles. On essaie de passer un maximum au solide – pour notre contribution à l’environnement.
L’eau :
Pareil pour l’eau, fini les bouteilles plastiques, nous avons le Berkey et ça, c’est une belle contribution! Je ferai d’ailleurs un post rien que pour lui.
Le taxi :
Une course en taxi coûte 0,90€ en moyenne. On n’a plus de voiture: énooorme économie !!! Du coup on marche beaucoup, on découvre et on fait du sport par la même occasion.
Les livres :
Les livres coûtent 20% plus chers.
Le resto :
On a un budget resto: il faut compter 1/3 du prix BEL, les jus, les sodas, l’eau, remplacent le vin. Par contre on prend parfois entrée/plat/dessert ce qu’on ne se permettait jamais autrefois. C’est aussi possible de manger pour 2,5€-5€ et c’est très bon !
L’alimentation :
Les fruits et légumes sont nettement moins chers et… quelle saveur !
Pomme de terre 0,50€/kg, tomate 0,60€/kg, courgette 1€/kg,…
La baguette classique coûte 0,12€, les olives 0,60€/100gr, les blancs de poulet 6€/kg, …
A savoir que d’un quartier à l’autre les prix peuvent passer du simple au double. Mes prix sont élevés car les beaux quartiers ne sont pas loin et je pense qu’en dehors de Casa ça doit être moins de la moitié de ces montants.
Reste les petites choses que l’on continue à acheter car nous avons vécu 40 ans en Europe et que l’on ne peut pas tout bouleverser comme ça! Sans doute que si, mais nous n’en avons pas envie. Les céréales par exemple, de marque Carrefour: Museli chocolat 3,50€, Café Bio en grains (on a un genre de Bi’OK en face) 9€/500gr et on en boit beaucoup! Il est trop bon, beurre 3€, Danone 1,2€/8, fromage Gouda 2,50€, Coca Zéro 0,6€/l,…
Eau et électricité etc… :
L’eau et l’électricité – même facture – c’est 45€/mois max. Avec machine à lessiver, lave-vaisselle, séchoir (que je n’utilise plus beaucoup), four, grand frigo toujours presque vide, chauffe-eau, deux ordis allumés tout le temps.
Je précise car tout le monde n’a pas cet équipement et notre facture est élevée en fait.
Ce qui est top aussi c’est que les compteurs sont relevés tous les mois, donc c’est la conso réelle. Pas de surprise.
La bonbonne de gaz 4€, la fibre optique 46,50€ et les frais de syndic 18€.
En résumé :
Voilà, vous voyez que c’est loin d’être la belle vie genre: avec 1500€ par mois on est complètement à l’aise !
Non, ce n’est pas le cas.
Un fois de plus, il y a mille façons de vivre ici, ça peut le faire, c’est possible évidement, puisque beaucoup de Marocains vivent avec trois fois moins: quand t’as un loyer à 100/200€, que tes enfants vont à l’école du gouvernement et que tu manges des tajines tous les jours.
Mais ce n’est pas notre cas.
Même si on ne fait pas d’excès.
Cela dit, nous vivons bien.
C’est surtout la qualité de vie qui est différente et elle n’a pas de prix !
Episode 12
L'intégration après 3 mois à Casablanca
5 octobre 2019

3 mois demain…
Demain c’est le jour sacré du temps pour soi, du temps pour la famille et… il y a le tournoi Fortnite au Mall !
Le premier constat : le temps passe extrêmement vite. 3 mois déjà!!! Non? Ce n’est pas possible!
J’ai fait un sondage auprès des enfants et Vincent, c’est le même constat. Les journées filent et les semaines aussi.
Les garçons sont totalement intégrés à leur nouvel environnement et dans leur école.
Pourtant, c’est très différent de ce qu’ils ont connu. On peut dire que le système ici s’apparente à ce que nos parents ont vécu. C’est à la dur. Inimaginable de faire un pas de travers.
Contrairement à ce que l’on pensait, ça ne les choque pas et au contraire, ils s’y retrouvent. Comme quoi, un peu de sévérité et de cadrage, ça ne fait pas de mal.
Le niveau est semblable à la Belgique. Jules ayant déjà fait une première, je peux comparer.
Je dirais même qu’ils rament en math et en… français!
Et oui !
Pour l’arabe, ils ont trois ans pour se mettre à niveau. En fin de troisième collège, ils passent le brevet international.
Bref, tout va bien pour eux. Ils ont beaucoup de copains et de… copines. J’ai cru comprendre qu’ils étaient un peu les stars auprès de la gente féminine. J’imagine que ça aide pour l’intégration et l’envie d’aller à l’école chaque matin.
Nous espérons ne pas avoir un papa ou un frère devant notre porte…
Et nous? Nous nous sentons bien. En accord avec notre choix et avec nous-mêmes.
Lorsque l’on migre, on part avec ses bagages au sens propre comme au sens figuré.
On reste qui on est, on garde sa personnalité. Les choses qui nous pelaient autrefois, nous pèlent toujours aujourd’hui. Dans un contexte différent.
Je suis mélancolique et sensible (je sais, on ne dirait pas, mais je le suis depuis toujours). Je fais des turbos-déprimes, et je suis vite touchée au plus profond de moi par une contrariété. Je râle et m’emporte rapidement.
Et bien rien n’a changé.
Si ce n’est que Vincent a peur lorsqu’il sent que je vais m’énerver car au Maroc, c’est mieux de garder son calme… sinon tu n’obtiens rien !
Donc j’apprends.
J’ai plus de facilité à canaliser certaines facettes de ma personnalité ici.
Quand je sens que je suis dans mes pensées, quand j’erre sans but et que mon cerveau surchauffe: une bonne douche et je descends dans la rue.
L’ambiance, les gens, l’appel à la prière,… tout ce qui m’entoure me met du baume au cœur.
J’aime ce pays et ses habitants !
Update : Jules a terminé deuxième au tournoi Fortnite.
Episode 13
Le Maroc et sa diversité
12 octobre 2019

Ce matin, dans le taxi qui me conduisait dans le centre, en regardant la ville s’animer, j’ai pensé au fait que le montant d’un mois d’allocations familiales pour deux enfants en Belgique est plus élevé que le montant du smic au Maroc.
Vous allez me dire que ce n’est pas comparable puisque le coût de la vie n’est pas le même. Ce n’est pas faux, mais ce n’est pas tout à fait vrai non plus… La vie à Casablanca est chère comparée aux autres villes du pays, les prix des loyers et des denrées de base sont plus élevés.
A Casablanca la misère côtoie la richesse à chaque coin de rue.
Et quand je parle de richesse, il faut le voir pour le croire !
La première fois que nous sommes venus ici nous avons hallucinés. De ma vie, je n’avais jamais vu autant de belles voitures !
Dans toute la ville il y a des SUV : BMW, Audi, Merco, Porsches, Maserati et j’en passe.
Il existe un quartier avec des villas immenses et magnifiques à faire pâlir les habitants de Beverly Hills.
Vous trouverez des restaurants à plus de 100€ le couvert, et juste à côté, un grand bidonville – avec vue sur l’océan.
Tout ça est assez dingue.
Les riches ont l’air… riche. Ils ne te gratifieront même pas d’un regard.
Et les pauvres n’ont pas l’air triste (je dis bien «l’air» car je ne sais absolument pas s’ ils le sont ou pas). Chacun vaque à ses occupations, certains travaillent, d’autres discutent, les mômes jouent, s’en vont à l’école, rigolent, crient et chantent… il y a beaucoup d’animation.
Il faut être ici pour comprendre la dynamique, mais en tous les cas, on ne ressent pas l’apitoiement et le désarroi… du tout. Bien au contraire, tout ce petit monde semble se côtoyer en harmonie. Semble… car je ne sais pas si c’est réellement le cas.
C’est parce que j’ai grandi en Belgique que je fais ce genre de calcul concernant le smic.
Nous avons rencontré un chauffeur de taxi qui fait suffisamment de courses (taxi) pour payer les charges courantes du ménage (repas, loyer, études de sa fille,…). Quand il estime avoir gagné assez d’argent pour sa journée, il arrête de bosser pour prendre du temps avec sa famille et pour lui.
Quelle est la définition du luxe finalement ?
Qui est le plus riche ?
Et nous, où nous situons-nous ? Je dirais que nous appartenons à la classe moyenne qui, visiblement, n’est pas très répandue. Les gens de notre immeuble en font partie – je pense. Je précise que nous sommes les seuls étrangers.
Une rue devant notre immeuble ce sont les quartiers populaires et deux rues derrières c’est « L’avenue Louise ». (Avenue chic de Bruxelles)
Ceux qui me connaissent imaginent sans peine quelle direction je prends en sortant de chez moi.
Autrefois, je vivais dans des contrées où l’on ne rencontrait pas un mendiant à chaque coin de rue.
Ici c’est le cas.
Parfois la culpabilité de vivre mieux qu’eux me submerge.
J’essaie de relativiser en me disant que nous participons activement à l’économie : en faisant nos achats chez les épiciers, les maraîchers, en dépensant le plus possible dans l’économie locale tout simplement.
Vous qui êtes venus chez nous en Belgique, vous savez que nous ne sommes pas dans la surconsommation et menons une vie simple. Ça n’a pas changé. On nous appelait les manouches ou les romanos au Plat-Pays… ici ce n’est pas encore le cas, mais ça ne saurait tarder.
Une jeune fille vient m’aider dans les tâches quotidiennes deux fois par semaine. Au début, j’ai hésité, j’avais l’impression d’être un colon, mais j’ai fini par accepter l’idée car je savais que ça allait me libérer du temps et apaiser mon esprit (toujours full, même en ce qui concerne le ménage – une vraie stressée !).
Il se trouve que j’avais tort sur mes idées préconçues. Cette fille adore venir travailler chez nous ! On la rémunère correctement, on est cool et je dirais même qu’on se met presque à genoux devant elle tellement on est heureux quand elle nous prépare un plat marocain – à tomber !
Elle n’a pas l’habitude… elle n’est pas accueillie de la même manière chez ses concitoyens.
Je mets sans cesse les choses en perspective en fait. Oui nous sommes privilégiés MAIS nous sommes loin d’être riche ET oui, nous faisons en sorte que notre argent arrive dans les poches de ceux qui en ont le plus besoin, tout du moins dans la mesure du possible.
Je termine sur ces paroles de Charles: il me semble que la misère serait moins pénible au soleil.
Je ne sais pas si c’est vrai… mais soyons pragmatique, c’est toujours mieux que d’être à 5 degrés sous la pluie.
Episode 14
Le Maroc et les Marocains
23 octobre 2019

Il est impossible de généraliser un peuple car chaque personne est différente.
C’est donc juste une perception. Ma perception.
Il y a tout de même des similarités chez tous les Casaouis que j’ai rencontré jusqu’à présent.
Pour donner un exemple avec le Belge : lorsque tu es au pays, c’est inimaginable d’avoir un regard d’ensemble sur les Belges. En général, tu te fais une idée de la personne qui est en face de toi et point. Tu ne vas pas fouiller dans sa culture ni dans son environnement de vie puisque c’est semblable à ce que tu connais. Tu vas scanner l’individu et non l’ensemble de la population.
Tu découvres vraiment le Belge lorsque tu le rencontres en dehors de ses frontières.
Quand tu voyages, tu l’abordes dans un autre contexte et tu te dis que le Belge est vraiment super cool, d’une grande gentillesse, souvent joyeux et bienveillant, il a aussi beaucoup d’humour et d’autodérision.
Au fil de tes périples, tu peux également comparer avec les autres nationalités que tu croises.
Il y en a une en particulier – que je ne nommerai pas mais … on sait qu’ils sont là !
Ils ont un avis sur tout et connaissent tout mieux que tout le monde : j’ai même eu droit à un cours sur le système électrique Indien !
D’une part, je n’en avais rien à cirer, et d’autre part, les Indiens eux même ne s’y retrouvent pas dans leur système.
Pour être honnête, depuis que nous sommes à Casablanca, nous n’avons rencontré aucun étranger, pas un seul. Nous vivons avec les Marocains et n’avons pas cherché à ce que les choses soient différentes.
Notre souhait a toujours été de s’immerger dans une autre culture et pas de recréer un microcosme avec des Européens en Afrique.
Chacun fait ce qu’il veut bien évidemment. Ce n’est pas un jugement, c’est notre point de vue.
Revenons au sujet… Les Marocains.
Le Marocain est avant tout d’une grande gentillesse. Par exemple, il va spontanément venir vers toi si tu es paumé dans la rue ou s’il voit que tu cherches quelque chose.
Lorsqu’il te croise, il prend toujours de tes nouvelles, des nouvelles de ta famille et aura toujours une gentillesse pour toi.
Bref, il est affable. Et ça fait du bien au moral !
Il est aussi trèèèèès curieux. L’air de rien, il va te faire parler, et au final, il te connaitra mieux que ta propre mère !
Il dit très rapidement: « Tu fais partie de la famille maintenant ! » « On est là pour toi, si tu as besoin de quooooi que ce soit n’hésite pas ». Le truc c’est qu’après t’avoir dit ça, tu ne le verras plus, et si tu le vois encore et que tu lui demandes quelque chose… tu ne l’auras jamais – ou tu dois être suuuuper patient.
Il a beaucoup d’humour et il est très drôle. Moi, il me fait rire aux larmes. Parfois à son insu parce qu’il en fait des caisses que c’est gros comme une maison… mais il continue, il exagère à fond et te raconte des histoires abracadabrantes, comme si tu étais dans un sketch !
Toi, t’as pas trop l’habitude… tu as plutôt les pieds sur terre… et tu te demandes s’ il se fout de toi?!
En fait non, c’est vraiment culturel.
Dans 15 minutes exactement, j’ai rdv chez le dentiste. Je suis toujours tranquille chez moi, en train d’écrire à mon bureau, car je sais qu’au mieux… elle aura une heure de retard.
« Madame, vous avez RDV mercredi à 15:30 Inch’Allah! ». Malheureusement, Dieu n’intervient pas souvent dans la ponctualité du Marocain.
Comme je le disais, il est affable, avenant, prévenant, aimable, calme, patient, bref, tout ce que vous voulez MAIS… pas sur la route !!!
C’est terrible. Ce n’est pas demain que je prendrai le volant. Quelle pression. Il est SUPER stressé.
Un exemple tout simple: le feu passe au vert, les voitures qui se trouvent devant – placées n’importe comment – klaxonnent instantanément. Un vrai concert! Même pas le temps d’embrayer !
On assiste aussi – très régulièrement – à des divergences de points de vue.
Entendez par là des bonnes bagarres à l’ancienne.
Femmes, hommes ou les deux. Et croyez moi, les femmes ne se laissent pas faire (à côté, je suis le calme incarné) ! Ça hurle à la mort, ça s’insulte de tous les noms d’oiseaux (je présume – c’est en darija), un jour un mec a même sorti une batte de base ball !
Ça dure une éternité… (et paralyse la circulation au passage, donc ajoutez les klaxons à l’ambiance générale) pour en fin de compte se prendre dans les bras l’un de l’autre et se souhaiter le meilleur !
Allez comprendre !
Petite histoire : Mohammed. Le gardien de rue. L’horodateur marocain – comme on les appelle ici.
C’est une des premières personnes que l’on a rencontrées en arrivant dans cette rue. Il ne parle pas le français et on ne connaît que quelques mots de darija ( + aujourd’hui qu’à notre arrivée) mais on passe tous les jours un peu de temps avec lui. Il est adorable. Maman, je t’entends penser d’ici : c’est parce qu’il attend de l’argent Virginie! Non non maman, on n’a pas de voiture, donc il ne reçoit pas d’argent de notre part. Il est tout simplement gentil. Gratuitement.
Le jour où l’on a emménagé, il nous a promis de s’occuper de tout pour que notre camion ait une place pour se garer. Le camion est arrivé. Et Mohammed s’est volatilisé !
Episode 15
Vivre dans un pays musulman
17 octobre 2019

Qu’est ce qui change pour nous ?
J’ai posé la questions aux enfants et voici en vrac leurs réponses:
- La religion est très présente: les gens sont très croyants. Ils invoquent et évoquent souvent Dieu, en Belgique on n’en parle jamais. (Je traduis ce qu’ils m’ont expliqué en me rejouant moult situations : dans les taxis, à l’école, chez l’épicier,…)
- Il y a l’appel à la prière mais ils l’aiment bien – même si parfois elle les réveille ou perturbe la classe. Il y a deux mosquées près de chez nous et une à côté de l’école. A vrai dire, il y en a partout.
- Il n’y a plus de jambon ni de lardons.
- Les relations avec les filles sont différentes, on doit faire attention ! (ça j’avoue, c’est du bourrage de crâne de notre part, en plus elles sont beaucoup moins réservées et timides qu’en Belgique !)
Gaspard me dit: les gens sont super gentils!
Moi: ça n’a rien à voir avec la religion ça Gaspard…
Gaspard: si si maman, une amie m’a expliqué que « Dieu a créé la terre: c’est un service qu’IL nous a rendu et en échange on doit le remercier en se comportant toujours bien ! ».
Voilà ce que nos enfants apprennent. C’est pas beau ça ?
Pour le moment ils disent qu’ils feront Ramadan pour essayer et faire comme les copains. On verra, ils ont le temps de voir venir puisque c’est dans plusieurs mois. Le midi, ils rentrent manger à la maison donc il n’y aura pas de souci de ce côté. S’ils veulent manger, ils peuvent. Par contre ils ne pourront pas se sustenter devant les amis.
En les inscrivant à l’école Marocaine, nous savions à quoi nous attendre.
C’est notre choix qu’ils aient un cours de religion Islamique et qu’ils baignent dans la culture du pays. Ce sont les seuls étrangers sur plus de 300 élèves.
A Casablanca c’est tout à fait possible de vivre complètement à l’Européenne. Tu peux inscrire tes enfants à la mission française ou belge. Tu peux vivre dans les quartiers de Gaouri (blancs), aller en boîte et picoler dans les bars de la Corniche (la Croisette de Casa).
C’est exactement ce qu’on ne fait pas .
Et pour nous, adultes, comment ça se passe ?
Ils ne nous ont jamais demandé de quel culte nous étions, par contre ils nous demandent de quelle origine nous sommes, et quand je dis Belge – avec beaucoup d’aplomb – ils me regardent bizarrement… en fait, je me rends compte à quel point j’oublie que je ne suis pas blanche !
Pour Vincent rien ne change, il y a bien l’appel à la prière mais on adore ces moments. On trouve cela très beau.
Pour moi, il y a l’habillement.
Je ne sors pas les épaules découvertes et je ne sors pas en short. Je l’ai fait quelques fois pour aller à la salle de sport ou à la plage mais ça me met mal à l’aise, donc je ne le fais plus.
Ici à Casablanca (et j’insiste sur le fait que c’est Casa), les femmes sont voilées ou non voilées, en habits traditionnels ou à l’occidental. Je dirais que c’est moitié/moitié et il ne semble pas qu’il y ait de problème.
Il suffit d’aller sur la plage populaire de Casa le WE pour comprendre qu’il y a une très grande mixité. C’est vraiment très cool. Le bikini côtoie le burkini et tout le monde s’en fout (même les grands-pères et les grands-mères qui sont nombreux).
Nous, nous sommes étrangers ici.
Nous avons décidé de vivre dans un pays musulman et ce n’est pas la même culture que la nôtre. Le minimum c’est de respecter les coutumes et les croyances du pays qui nous accueille. Nous sommes invités.
Update 7/09/24 : sur les photos ci-dessous, tu vois que je porte souvent le foulard à la plage ou en balade, mais c’est uniquement pour éviter l’insolation. Je suis et reste athée.
Episode 16
Ce qui nous manque au Maroc...
15 novembre 2019

Sincèrement… je ne vois qu’une seule chose.
Pour le reste on s’adapte.
Et encore, je n’ai pas le sentiment de devoir m’adapter.
On s’est acclimatés au timing « rock’n roll » du Marocain.
On a accepté son côté optimiste à toute épreuve : « Oui, oui pas de problème ! » – alors qu’il y en a un qui crève les yeux.
On s’est adapté à la complexité administrative.
Etc etc…
Le côté assez rigide et sans surprise du plat pays ne me manque pas.
Ici des surprises tu en as, c’est certain ! C’est assez rare que les choses se passent comme tu l’avais imaginé au départ, du coup tu n’anticipes plus vraiment, et tu apprends à lâcher prise et à ne pas tout programmer ABSOLUMENT.
Ceci dit je le fais encore… on ne peut pas changer du jour au lendemain. Mais je m’améliore.
Le seule chose qui me manque…
C’est de ne pas pouvoir parler le français avec les gens que je côtoie – autre que ma famille évidemment.
Je le parle – puisque je ne sais pas encore échanger dans leur langue – mais ce n’est pas mon français habituel.
C’est précisément à ce moment que tu te rends compte qu’entre amis, lorsque l’on discute à bâtons rompus, on utilise des dizaines et des dizaines de mots inutiles et beaucoup de Belgicismes.
On s’emballe dans des phrases hyper longues qui seraient totalement incompréhensibles pour un Marocain – voir même pour un Français.
Faites le test et écoutez-vous parler… vous comprendrez ce que je veux dire.
Etant donné que la langue maternelle des habitants de ce pays est le Darija (arabe marocain), et même si certains parlent très bien le français, je fais toujours attention à réduire mes phrases au minimum syndical afin de faciliter la compréhension de mon interlocuteur.
Du coup, tu n’es plus vraiment toi-même puisque c’est un solide exercice ! Et ça… ça me manque : j’ai envie de parler belge sans réfléchir constamment à ce que je dis.
Anecdote :
Les enfants ont un prof de français qui s’apprécie beaucoup… si vous voyez ce que je veux dire…
Monsieur LA science infuse. Au dessus c’est le soleil.
Un jour ils sont rentrés de l’école et ils nous ont raconté que ce cher jeune homme souhaitait qu’ils perdent leur accent belge au profit de l’accent français.
Autant vous dire qu’il m’a entendue à la réunion des parents !
Je lui ai gentiment fais savoir que nous étions très fiers de notre culture et par conséquent de notre accent, et qu’il était HORS de question que mes garçons essayent de perdre quoi que ce soit !
Il était très gêné…
Bref, pour le français… c’est comme ça.
Ça ne changera pas et on se lâche à la maison.
Episode 17
Sommes-nous fous ?
23 novembre 2019

Sans doute y a-t-il une part de folie dans nos actes.
Ça dépend du point de vue où l’on se place évidement, mais c’est sûr que nos choix de vie ont interpellés plus d’une personne.
En voici quelques-uns :
(« Elle a eu un enfant à 17 ans ! » pourrait faire partie de la liste. Mais ça ne nous concerne pas tous les deux donc je passe).
« Ils sont fous, ils ont eu deux enfants pratiquement la même année ! »
Oui, et c’est la meilleure décision que l’on ait prise de notre vie !
Car OUI c’était un choix et NON ce n’était pas un accident comme j’ai pu l’entendre à maintes reprises :
« Oh ma pauvre, comment tu vas faire ? ».
(Mêle-toi de ce qui te regarde… c’est ce que tu as envie de dire… mais tu ne dis rien…)
Nous souhaitions un troisième enfant – le plus rapproché possible du second (Inch’Allah – on ne peut pas tout contrôler) – et l’univers nous a entendu.
J’ai également eu droit à : « Moi je ne pourrais pas ! Je ne vois pas comment on peut s’occuper de deux enfants si rapprochés et les aimer autant l’un que l’autre. »
Ce que j’aurais du dire : « Peut être que toi tu ne vois pas… mais moi je vois, et je le fais très bien ».
Ce que j’ai dit : Rien…
J’ai emmagasiné des conneries du genre pendant des années sans rien rétorquer. Souvent parce que je trouvais ça tellement débile que je ne savais pas quoi répondre, et parfois parce que j’étais tellement choquée que rien ne me venait spontanément.
J’ai appris avec le temps et l’expérience que l’être humain est capable d’accumuler beaucoup, beaucoup de choses : des remarques désobligeantes, de la méchanceté gratuite, de la jalousie malsaine…
Mais il finit toujours pas craquer.
Suite:
« Ils sont fous, ils construisent un café-concert en pleine brousse Namuroise ! ». Pour le coup c’est pas faux.
C’était fou certes, mais néanmoins – même si dès le premier jour nous savions tous les deux que l’on s’était fourvoyés sur le projet (être derrière un bar n’allait pas nous passionner) – nous avons passé des moments incroyablement privilégiés que personne (excepté ceux qui ont tenu ce genre d’établissement) n’a la chance de vivre.
C’est ce que l’on retiendra de ce projet.
Ce qu’il nous a également enseigné, c’est que l’on peut partir de rien, zéro, bulle, pas 1€ en poche et qu’avec de la volonté, du travail et de la persévérance on peut obtenir ce que l’on veut.
Cette aventure nous a construit et elle nous a ouvert les yeux : par la suite nos priorités sont devenues plus claires et nos envies pour l’avenir aussi.
Tout nous sert.
« Ils sont fous, ils se sont mariés à deux !!! On l’a appris via Facebook ! Et leurs parents n’étaient même pas présents ! ».
En effet, on ne voyait pas les choses autrement donc… pour quelles raisons nous serions-nous forcés à faire un cinéma qui ne nous ressemble pas ?
Chacun fait ce qu’il veut.
Même si je comprends bien que ce n’est pas une pratique conventionnelle et que ça peut susciter des questionnements.
Aujourd’hui je me dis : si notre « folie » a pu alimenter des discussions tant mieux.
Discuter ça fait réfléchir et c’est toujours ça de pris.
« Ils sont fous, ils partent vivre à l’étranger ! Avec des enfants ! Dans un pays musulman… et j’pense même qu’ils n’ont pas de travail… Ils vont vivre d’amour et d’eau fraîche ?
Ils sont quand même sur leur nuage tsé ces deux là ! Ils vont vite rev’nir ! Tu vas voir… »
L’avenir nous le dira…
Je termine à l’instant un WhatsApp avec ma maman. Elle me dit qu’une personne lui a dit :
« Virginie ? Elle a toujours fait ce qu’elle voulait de toute façon ! ». (Genre l’indomptée…)
J’ai envie de lui dire :
« Ben oui… heureusement non ? Si tu as envie de t’enchainer fais-le ! Perso, ce n’est pas mon concept : j’expérimente, je me plante, je tombe, je sombre, je me relève et j’avance.
Est-ce que je me mêle de ta vie ? Non. »
Une dernière chose : mille mercis pour les messages que vous m’envoyez.
Je n’écris pas pour vous.
Je l’ai dit : c’est un exutoire, un acte égoïste.
Mais ça me fait immensément plaisir de recevoir ces petits mots :
- Tes chroniques me redonnent de l’espoir.
- J’apprends des choses en te lisant.
- Vous nous inspirez ! Nous aussi on aimerait bouger de la Belgique… jusqu’à présent on n’osait pas, on va y réfléchir…
C’est – mot pour mot – des messages que j’ai reçus.
Merci.
Si tu souhaites m’écrire c’est par ici.
Episode 18
En travaux... mais sur la bonne voie
27 novembre 2019

Sans doute y a-t-il une part de folie dans nos actes.
Ça dépend du point de vue où l’on se place évidement, mais c’est sûr que nos choix de vie ont interpellés plus d’une personne.
En voici quelques-uns :
(« Elle a eu un enfant à 17 ans ! » pourrait faire partie de la liste. Mais ça ne nous concerne pas tous les deux donc je passe).
« Ils sont fous, ils ont eu deux enfants pratiquement la même année ! »
Oui, et c’est la meilleure décision que l’on ait prise de notre vie !
Car OUI c’était un choix et NON ce n’était pas un accident comme j’ai pu l’entendre à maintes reprises :
« Oh ma pauvre, comment tu vas faire ? ».
(Mêle-toi de ce qui te regarde… c’est ce que tu as envie de dire… mais tu ne dis rien…)
Nous souhaitions un troisième enfant – le plus rapproché possible du second (Inch’Allah – on ne peut pas tout contrôler) – et l’univers nous a entendu.
J’ai également eu droit à : « Moi je ne pourrais pas ! Je ne vois pas comment on peut s’occuper de deux enfants si rapprochés et les aimer autant l’un que l’autre. »
Ce que j’aurais du dire : « Peut être que toi tu ne vois pas… mais moi je vois, et je le fais très bien ».
Ce que j’ai dit : Rien…
J’ai emmagasiné des conneries du genre pendant des années sans rien rétorquer. Souvent parce que je trouvais ça tellement débile que je ne savais pas quoi répondre, et parfois parce que j’étais tellement choquée que rien ne me venait spontanément.
J’ai appris avec le temps et l’expérience que l’être humain est capable d’accumuler beaucoup, beaucoup de choses : des remarques désobligeantes, de la méchanceté gratuite, de la jalousie malsaine…
Mais il finit toujours pas craquer.
Suite:
« Ils sont fous, ils construisent un café-concert en pleine brousse Namuroise ! ». Pour le coup c’est pas faux.
C’était fou certes, mais néanmoins – même si dès le premier jour nous savions tous les deux que l’on s’était fourvoyés sur le projet (être derrière un bar n’allait pas nous passionner) – nous avons passé des moments incroyablement privilégiés que personne (excepté ceux qui ont tenu ce genre d’établissement) n’a la chance de vivre.
C’est ce que l’on retiendra de ce projet.
Ce qu’il nous a également enseigné, c’est que l’on peut partir de rien, zéro, bulle, pas 1€ en poche et qu’avec de la volonté, du travail et de la persévérance on peut obtenir ce que l’on veut.
Cette aventure nous a construit et elle nous a ouvert les yeux : par la suite nos priorités sont devenues plus claires et nos envies pour l’avenir aussi.
Tout nous sert.
« Ils sont fous, ils se sont mariés à deux !!! On l’a appris via Facebook ! Et leurs parents n’étaient même pas présents ! ».
En effet, on ne voyait pas les choses autrement donc… pour quelles raisons nous serions-nous forcés à faire un cinéma qui ne nous ressemble pas ?
Chacun fait ce qu’il veut.
Même si je comprends bien que ce n’est pas une pratique conventionnelle et que ça peut susciter des questionnements.
Aujourd’hui je me dis : si notre « folie » a pu alimenter des discussions tant mieux.
Discuter ça fait réfléchir et c’est toujours ça de pris.
« Ils sont fous, ils partent vivre à l’étranger ! Avec des enfants ! Dans un pays musulman… et j’pense même qu’ils n’ont pas de travail… Ils vont vivre d’amour et d’eau fraîche ?
Ils sont quand même sur leur nuage tsé ces deux là ! Ils vont vite rev’nir ! Tu vas voir… »
L’avenir nous le dira…
Je termine à l’instant un WhatsApp avec ma maman. Elle me dit qu’une personne lui a dit :
« Virginie ? Elle a toujours fait ce qu’elle voulait de toute façon ! ». (Genre l’indomptée…)
J’ai envie de lui dire :
« Ben oui… heureusement non ? Si tu as envie de t’enchainer fais-le ! Perso, ce n’est pas mon concept : j’expérimente, je me plante, je tombe, je sombre, je me relève et j’avance.
Est-ce que je me mêle de ta vie ? Non. »
Une dernière chose : mille mercis pour les messages que vous m’envoyez.
Je n’écris pas pour vous.
Je l’ai dit : c’est un exutoire, un acte égoïste.
Mais ça me fait immensément plaisir de recevoir ces petits mots :
- Tes chroniques me redonnent de l’espoir.
- J’apprends des choses en te lisant.
- Vous nous inspirez ! Nous aussi on aimerait bouger de la Belgique… jusqu’à présent on n’osait pas, on va y réfléchir…
C’est – mot pour mot – des messages que j’ai reçus.
Merci.
Si tu souhaites m’écrire c’est par ici.
Episode 19
La notion d'amitié lorsqu'on est immigrés
20 décembre 2019

Comme vous l’aurez compris en lisant mes posts précédents, la communication n’est pas compliquée au Maroc… c’est très facile d’échanger avec les gens.
Il y a cette « tradition » du « Bonjour, ça va ? – Salam Aleykoum, labès ? » qui fait que tu as l’impression de connaitre tout le monde et ce, assez rapidement.
Il y a aussi cette notion du temps qui est différente – ou absente je dirais -, et de ce fait, ça permet de parler tranquillement. Il n’est pas rare qu’en sortant faire les courses je croise deux personnes qui discutent, et quand je rentre 1h00 plus tard elles n’ont pas bougés d’un pouce.
Le Marocain est « très famille ». Comme en Inde, la « tribu » est importante. Souvent il y a plusieurs générations dans le même foyer, et dans les quartiers plus populaires les voisins y sont aussi intégrés. Il y règne une belle énergie !
Cependant, d’après mes observations, la notion d’amitié – telle qu’on la connait en Belgique – n’existe pas ou peu : on parle beaucoup, on se prend dans les bras, mais je ne pense pas qu’il y ait un attachement profond, un sentiment d’exclusivité.
Tout reste superficiel. Peut-être que je me trompe.
Et nous, les étrangers?
Nous n’avons pas d’amis au Maroc, je ne pense pas que nous en aurons, et pour être honnête, nous ne cherchons pas à en avoir.
Je pourrais inviter les voisins avec qui on s’entend bien… mais je ne le fais pas. Je parle avec eux en dehors du cocon familial, dans les lieux communs, et ce côté superficiel me convient parfaitement.
J’ ai été tellement déçue et triste des relations d’amitié que j’ai pu avoir au pays qu’aujourd’hui je n’ai plus du tout envie de renouveler l’expérience.
En Belgique on ne voyait plus grand monde. Dans mon coeur il y a – et il y aura toujours – mon groupe d’amis avec qui j’ai grandi… mais chemin faisant, on ne se côtoyait plus du tout.
Les parcours de vie s’éloignent, les enfants naissent, le travail épuise, le temps devient précieux…
En fait il n’y a pas d’excuse parce que si on a envie de se voir… on peut le faire. Il se trouve que nous nous sommes volontairement éloignés de tout le monde.
Un événement m’a fait beaucoup réfléchir à la notion d’amitié (et a précipité cet éloignement).
Au cours de ma vie, j’ai passé des centaines d’heures à écouter les gens me raconter leurs vies, leurs problèmes, leurs désespoirs,… je pense avoir été une bonne oreille et je le faisais avec empathie parce que je suis comme ça, c’est dans ma nature.
Quand moi-même j’ai sombré… seuls mon mari et mes 3 enfants m’ont soutenue. Hormis eux, absolument personne ne s’est inquiété de moi. Ça ouvre les yeux. On ne donne pas pour recevoir en retour mais – durant cette période difficile de ma vie – quelques messages bienveillants auraient été les bienvenus. Je sais qu’ils m’auraient aidée à me rétablir plus rapidement.
Ça vous est peut-être arrivé ?
Je ne vous le souhaite pas car ça fait très mal. Mais je n’en veux à personne.
La vie à la Belge réduit le temps que l’on consacre à ses amis. Lorsque l’on parvient à se libérer quelques heures, on privilégie une bonne fête pour décompresser plutôt que de se faire ch… à écouter les problèmes des autres. On a également ses propres soucis à régler.
Résultat : nous n’avons eu aucun mal à immigrer étant donné que nous n’avions plus d’attache (hormis familiale) chez nous.
Ces expériences nous ont rapprochés, et de ce fait, nous n’avons plus besoin – comme autrefois – de personnes extérieures pour nous sentir entourés, existés, rassurés, divertis.
Aujourd’hui tous ces sentiments sont comblés par le seule fait d’être en famille et d’être heureux. On a gardé deux-trois meilleurs potes et on continue à échanger en visio ou par messages.
Peut-être qu’un jour les choses changeront… mais pour le moment nous sommes bien et ce mode de vie nous convient.
Episode 20
Le déménagement et le minimalisme
27 décembre 2019

Même si nous ne sommes pas ce que l’on appelle de gros consommateurs, la question s’est tout de même posée lors de la préparation du déménagement.
Quand j’ai commencé à ouvrir les placards de notre maison, et pire… lorsque j’ai trié ce qui était « abandonné » chez mes parents, on a compris que nous avions accumulé une tonne de choses en 40 ans !
On garde pour… « On ne sait jamais ! », « C’est sentimental tu comprends ? », « Je vais bien finir par maigrir ! » ou parce que ça a toujours été là, et qu’on n’imagine pas une seconde que ça ne le soit plus.
Le tri a débuté avec ces petites phrases en tête :
- « Est-ce que cet objet t’apporte du bonheur Virginie ? »
- « Est-ce qu’il t’est utile ? »
J’avais lu ça sur le web.
En appliquant cette technique, j’ai jeté et vendu pas mal de choses. On a aussi donné beaucoup – beaucoup – de vêtements. Ce que l’on fait au Maroc également, sauf qu’ici je le fais immédiatement et je n’attends pas que… je ne sais pas exactement ce que j’attendais.
Bref, ce fut plusieurs remorques vers la déchèterie, beaucoup de sacs pour les bulles à vêtements et plus de 2500€ de ventes sur un site web de seconde main (oui, effectivement, nous avions pour 2500€ de biens non utilisés chez nous !)
Pourtant…
On ne se qualifie pas comme « des gens matérialistes ».
Nous n’avons pas la télévision, et de ce fait, les seules publicités que l’on voit c’est durant les coupes de football tous les deux ans. Autrement c’est des débuts de pub sur Youtube que l’on zappe et les panneaux publicitaires dans les rues (pas le choix).
J’ignore si cela a un impact sur notre mode de consommation mais j’imagine que ça l’influence, dans le sens où l’on n’est pas tentés puisqu’on ne connait pas, ou tout du moins, on n’est pas pollués par des messages commerciaux répétitifs.
On achète des choses – si on en a besoin – qui vont nous accompagner longtemps.
On choisit des objets de qualité – je peux passer des soirées entières à faire des comparatifs qualité/prix avant un achat.
La preuve c’est que la plupart des biens qui nous ont suivis à Casablanca datent de notre premier emménagement ensemble en 2003.
Malgré tout, il faut avouer que l’on avait tout de même 30m3 pile ! Ce qui n’est pas rien…
Posséder moins rend plus heureux, permet d’aller à l’essentiel, ça fait de l’ordre dans l’espace de vie mais aussi dans sa tête et on se sent plus léger.
Moins consommer c’est bon pour son portefeuille, pour son moral et pour la planète.
On garde près de soi que ce qui nous tient à coeur.
En ce qui nous concerne c’était surtout les livres et les Rock&Folk : PAS TOUCHE avant qu’on ait rendu notre dernier souffle! On a tous un péché mignon.
PS : c’est notre opinion, pas un jugement, chacun vit comme il l’entend.